À l'image de Ferrari et de Testa Rossa, liés de façon indicible, les noms de Porsche et de Carrera sont désormais inséparables. L'histoire a débuté, il y a trente ans sur les routes de la légendaire Carrera Panamerica, entretenue par la tradition sportive de Porsche qui a attribué le label Carrera à ses modèles d'exception.L'EPOPEE DE LA CARRERA PANAMERICAAvec le lancement de cette course en 1950, le Mexique voulait attirer l'attention du monde sur le travail de titan qu'il venait à peine de terminer. La route Panaméricaine, dont la construction avait été décidé en 1924, reliait désormais l'Alaska à la Terre de Feu à l'ouverture du tronçon mexicain. L'idée de lancer une grande course automobile sur les quelques 3000 km de cette route séduit les autorités avides de donner au pays une image dynamique. La première édition partira de Ciutad Juarez à la frontière des USA pour relier Tuxla Gutierez à la frontière du Guatemala. Dès l'édition suivante, disputée dans le sens inverse, Ferrari s'impose avec ses 212 INTER. Tout s'accélère très vite, un succès dans la Panaméricaine devient incontournable pour les constructeurs européens.
La notoriété d'une victoire leur ouvre les portes du marché nord-américain des voitures de sport et leur permet d'asseoir leur réputation dans une des épreuves les plus exigeantes pour leurs mécaniques. Bientôt, Ferrari, Lancia, Gordini, Mercedes, Alfa Romeo, deviennent des fidèles du rendez-vous de novembre au Mexique et les Fangio, Kling, Behra, Phil Hill, Ascari y écrivent les plus belles pages de l'histoire du sport automobile.
C'est en 1952 que débute l'aventure Porsche au Mexique. Deux 356 S (un coupé et un cabriolet) sont engagés par le Prince von Holenhohe, alors importateur JW, pour des équipages tout aussi aristocratiques. Le Prince Paul von Metternich associé au diplomate brésilien Manuel de Teffé la catégorie 1600 sport avec le cabriolet tandis que le comte von Berckheim associé au déjà fidèle Herbert Linge sera contraint à l'abandon.
Dès l'édition suivante Porsche aligne deux spiders 550 pour Karl Kling, le vainqueur sortant (sur Mercedes 300 SL) et pour sans Herrmann, le champion d'Allemagne catégorie sport. Le Baron Von Hanstein - assure la direction sportive de l'équipe qui a reçu le soutien d'une compagnie d'aviation américaine Fletcher. L'usine qui s'engage ici pour la première fois loin de ses bases, réalise un beau doublé dans la première étape mais les deux voitures sont éliminées dès le lendemain.
L'écurie guatémaltèque Los Caminos ne sont guère plus heureuses. Même si José Herrarte fait figure de héros dans son pays, il doit se contenter d'une modeste 32e place au scratch avec son coupé 550 qui enlève tout de même sa catégorie.
Cette semi déroute de 1953 va se transformer en véritable triomphe l'année suivante. Porsche ne lésine pas sur les moyens et engage trois spiders 550 pour Hans Herrmann, Jaroslav Juhan, un Guatémaltèque d'origine tchèque importateur Porsche et Jaguar dans son pays, et le Mexicain Segura associé à Herbert Linge. Cette ultime édition de la Carrera Panamerica se résume à un duel opposant les deux Ferrari de Maglioli (375 Plus) et Phil Hill (375 MM. Derrière les intouchables italiennnes, Herrmann et son spider enlèvent tout de même cinq étapes et double sa victoire en catégorie 1500 par une très belle 3e place au classement général juste devant son équipier Juhan. Cette réussite fut dignement célébrée d'autant plus qu'elle mettait un terme à une saison particulièrement riche en succès pour la jeune marque.
L'explication était toute simple, les spiders 550 disposaient désormais d'un vrai moteur de course plus puissant et moderne que les vaillantes mécaniques VW.
Ce quatre cylindres, qui peut être considéré comme le premier moteur 100 % Porsche, a été conçu et réalisé par Ernst Fuhrmann. Ce jeune Autrichien, diplômé de l'école d'ingénieurs de Vienne, est engagé par Porsche en 1947 au Service des moteurs expérimentaux et travaille dès son arrivée sur le projet Cisitalia Grand prix. En 1952, Hutscke von Hanstein, directeur du service course, insiste auprès de Karl Rabe pour disposer d'un moteur plus performant pour les nouvelles 550. En concertation avec ce dernier, il désigne Fuhrmann comme maître d'oeuvre du projet. Terminé au printemps 1953, le type 547 est un flat 4 de 1498 cm3, double ACT de 110 ch qui se distingue par un allumage sophistiqué fait de deux bougies jumelées par cylindre.
La nouveauté qu'une timide apparition lors d'une séance d'essais au Nürburgring en août avant de débuter à la course de côte de Fribourg aux mains de Hans Stuck. Châssis mal adapté aux cotes du nouveau moteur ou voiture déjà trop ancienne ? le résultat n'est pas à la hauteur des espérances. Fuhrmann estime ne pas déceler le gain.
C'est ainsi que Von Hanstein et Fuhrmann prennent la décision d'aligner deux spiders dotés du classique flat 4 à culbuteurs à l'édition 1953 de la Carrera.
Le spider 550 à moteur double arbre est présenté officiellement au Salon de Paris en octobre 1953 avant d'effectuer ses grands débuts en compétition à l'occasion des Mille Miglia au printemps suivant. Herrmann-Linge terminent à une honorable 6e place au classement général et profitant des ennuis de l'Osca de Cabianca, enlèvent la catégorie 1500. Au Mans, la victoire de classe de l'équipage belge Claes-Stasse tient un peu du miracle. Moteurs cassés, deux des trois 550 ont abandonnées avant minuit; les rescapés ménagent leur mécanique mais loin derrière les Osca qui dominent la catégorie. A 90 minutes, de l'arrivée, les deux voitures rouges renoncent à leur tour sur accident, laissant la victoire au spider Porsche qui tourne depuis longtemps sur trois cylindres. L'allumage du flat 4 sera modifié et les spider 1500 vont connaitre une fin de saison euphorique : victoire de classe aux 12 Heures de Reims, les quatre premières places au GP Sport 1500 disputé en prologue du GP d'Allemagne au NUrburgring,,ai GP de Suisse, et enfin au/de Berlin sur l'Avus pour ne citer que les grandes épreuves internationales. Dernière épreuve de l'annee 1954, la Carrera Panamerica fut en quelque sorte l'de son succès.
La renommée de la course à son ultime édition se transforme déjà en légende. Un peu à l'image d'une star de cinéma Fauchét en pleine jeunesse.
En 1955, Porsche célèbre le 25e anniversaire de sa fondation et comme un bonheur ne vient jamais seul, la firme va pouvoir réintégrer ses locaux de Zuffenhausen réquisitionnés depuis 1938. Porsche profite de l'événement pour apporter de profondes mutations à la 356. Présentés au Salon de Francfort en septembre 1955, les modèles 356 A conservent toutefois leur ligne traditionnelle mais à y regarder de plus près, les modifications et améliorations sont nombreuses. La 356 Ait proposée comme l'ancien modèle en versions Coupé, Cabriolet et Speedster et la plus évidente des retouches se voit au niveau du pare brise plus bombé sans pli central et doté de montants plus fins. Les Speedsters eux aussi un pare brise plus haut afin d'améliorer la visibilité une fois la capote baissée.
Plus de confort également pour la 356 A, une nouvelle planche de bord, une isolation phonique améliorée qui permet enfin d'écouter la radio en roulant et enfin le plancher abaissé de trois centimètres pour faciliter l'accès à bord.
Le comportement amélioré par l'apport de nouvelles suspensions plus souples avec un débattement plus important qui, conjuguées aux nouvelles dimensions des pneus amélioraient considérablement la tenue de route. La 356 A veut apprivoiser une clientèle plus sage et moins sportive qui était jusqu'à présent effarouché par le caractère survireur des précédentes versions. Plus moderne, plus confortable, plus sage même si elle demeure une incorrigible survireuse, la 356 A devient une GT civilisée mais la clientèle sportive est loin d'être négligée. Bien au contraire. Aux versions 1300, 1300 Super, 1600 et 1600S s'ajoute une version survitaminée : la 1500 GS (Grand Sport) plus connue sous le nom de Carrera.
LA PLUS RAPIDE DES 356
La tentation était grande d'installer un moteur type 547 créé pour la course dans un châssis de 356. Ernst fuhrmann, le concepteur du projet, ne sût résister longtemps et monta un de ses moteurs dans sa propre voiture... juste pour voir ! Si l'adaptation flat 4 double arbre dans le compartiment arrière de la 356 ne fut pas des plus aisée, le résultat fut à la hauteur des espoirs de Fuhrmann. Cet épisode se prolongea logiquement par la mise au point d'un moteur de compétition. Le moteur 547 est alors monté dans un coupé "Gmünd"-(l'un des quatre coupés à carrosserie aluminium fabriqué en Autriche en 1948-49; plus légers.
Le département course est réservé à son usage exclusif et aligner au départ du Maraython Liège-Rome-Liège en août 1954. Helmut Polensky, champion d'Europe des rallyes 1953 avec une 356 "alu", associé au fidèle Herbert Linge parvient à triompher de la Lancia de Gendebien et enlève l'une des victoires les plus de la saison routière. Après ce succès et le souhait de nombreux clients de la marque de disposer d'une GT plus puissante, Fuhrmann et Von Hanstein parviennent à convaincre Ferry Porsche de lancer une série limitée à 100 exemplaires de cette version musclée pour satisfaire aux quota' d'homologation en GT. Les premiers essais débutent sur la voiture personnelle de Ferry Porsche dans la plus grande discrétion. La 356, surnommée affectueusement Ferdinand en hommage au professeur Porsche, cède bientôt la place à un cabriolet gris, pendant l'été 1955, encore une fois "voiture de fonction de Ferry porsche. Le "cocktail" n'en finit pas d'étonner le personnel de fie. Le châssis de la 356 se montre4. tout à fait capable de prendre en charge le surcroît de puissance et le moteur 547 destiné à la course se montre fiable et endurant. Celui-ci est toutefois légèrement modifié pour un usage plus civilisé : le taux de compression est réduit dans un premier temps à 8,7 (au lieu de 9,5) puis remonté à 9, les deux distributeurs sont placés de façon plus accessible, mais il est toujours pratiquement impossible de changer les huit bougies sans déposer le moteur ! la puissance atteint les 100 ch à 6200 t/mn (au lieu de 110 ch pour la version course) mais peut sans dommage un régime de 7000/7500 t/mn. Le compte-tours d'ailleurs gradué à 8000 t/mn alors que le compteur de vitesse, plutôt optimiste,jusqu'à 250 km/h.
En réalité, la Carrera frisa seulement les 200 km/h mais avec des accélérations dignes d'une grosse cylindrée. La Carrera qui voit le jour en même temps que la 356 A bénéficie donc de tous les perfectionnements de cette version à laquelle, elle ressemble comme une soeur. Extérieurement, elle se distingue par le label Carrera finement apposé sur les ailes avant* et le capot arrière et des pneus plus larges. Enfin, quelques accessoires accentuaient son tempérament sportif : sièges baquets et volant en bois. Selon une habitude bien établie chez Porsche, la Carrera était disponible avec les trois carrosseries : Coupé, cabriolet et Speedster.
En 1956 mais Glockler, le neveu du célèbre créateur des premiers spiders, est victime d'un grave accident et la voiture détruite dans un incendie.
Très polyvalente, la Carrera va même s'attaquer à des records de vitesse sur la piste de Monzap en mars 1957. Ce Speedster qui a reçu une carrosserie est équipé d'un moteur spécial- pistons et cylindres en alliage léged7-réalésé à 1529 cm3 et ne pèse que 842 kg. A son volant, Rolf Goetze, Paul Straehle et Richard I von Frankenberg vont se relaient pendant 24 heures et battre les records des 1000 miles, 2000 km et 12 heures dans la catégorie 1600-2000.
En mai 1957, Porsche élargie sa gamme Carrera en proposant une version "De Luxe" mieux adaptée aux exigences de la circulation et une version GT réservée aux Coupés et aux Speedsters. Ces derniers destinés à la compétition la puissance de leur moteur augmentée de 10 ch et bénéficient des freins et de la direction empruntés au spider 550. L'aménagement intérieur réduit à sa plus simple expression : pas de chauffage, pare-chocs symboliques, vitres en plastique... Plus légers de 50 kg, les GT adoptgent des capots et des portières en alliage léger et par leur autonomie augmentée par le montage d'un réservoir de 80 litres. L'aspect agressif est encore renforcé par un prise d'air forcé' travers des ouvertures dans le capot. Les Carrera GT vont se tailler un palmarès éloquent sur les routes et les circuits- en particulier aux Etats Unis- pendant près d'une dizaine d'années. En effet, les pilotes américains de Speedsters seront encore invincibles dans leur catégorie jusqu'à l'avènement de la 911.. En Europe, la Carrera occupe le devant de la scène sportive dès 1957. Les Français Claude storez et Robert Buchet enlèvent le Marathon de la Route sur un Speedster avant de se classer 6e du Tour auto et de remporter l'Indice. Les coupés GT ne sont pas en reste, victorieux de la catégorie 1600 aux 12 Heures de Reims, ils terminent aux 6e et 7e places du classement général.
Handicapée par son moteur étroitement dérivé de la compétition, la Carrera reste toujours délicate à conduire dans des conditions de circulation normale. Le 1500 ne commence à trouver son véritable rythme qu'au dessus de 4000 t/mn et au premier embouteillage venu ales huit bougies s'encrassent rapidement avec les conséquences que l'on connaît: opération d'entretien longue et peu à la portée du premier venu ! Dans ce but, la Carrera se civilise dans sa version 1958. Sous l'impulsion de Klaus von Rücker, responsable du projet, un vilebrequin classique sur paliers lisses remplace le vilebrequin Hirth monté sur roulements. Ce changement implique le montage de deux radiateurs d'huile pour atténuer l'élévation de température du lubrifiant. Dans le même temps, l'alésage est porté à 87,5 mm, ce qui donne en conservant la course de 66 mm une cylindrée de 1588 cm3. La puissance du modèle De Luxe est volontairement limitée à 105 ch à 6500 t/mn. Ce moteur qui prend l'appellation 692, conserve toutefois son vilebrequin Hirth dans les versions plus particulièrement destinées à la compétition développant l25 ch. Une quinzaine de ces coupés "Silver GT" furent engagés avec succès par l'usine et ses fidèles clients aussi bien rallyes qu'en circuits et furent rarement mis en difficulté dans leur catégorie. Von Hanstein qui revient à la compétition enlève la classe 1600 GT aux 12 heures de Sebring, avant de terminer 4e de la Targa Florio avec Pucci tandis que Straehle-Walter 1'emportenkau Nürburgring.sa
Même moisson de succès en 1959, victoire de classe à Sebring et au Nürburgring, les 3e et 4e places à la Targa, le tout assorti d'innombrables victoires en rallyes.